« Les Européens s’inquiètent pour nous … »

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Photo: Felwin Sarr par Rama sur Wikimedia

Extrait de l’article Coronavirus : « Les Européens s’inquiètent pour nous et nous nous inquiétons pour eux », estime Felwine Sarr | Pour de plus amples information, veuillez consulter le site suivant.

Il est l’un des intellectuels les plus importants du continent africain. Depuis le début de la pandémie de coronavirus, l’économiste et écrivain Felwine Sarr met son expertise au service du plan de résilience économique et sociale mis en place par le gouvernement sénégalais. Dans un entretien accordé depuis Dakar à TV5MONDE, l’auteur de l’essai Afrotopia (2016) et co-auteur du rapport sur la restitution des œuvres du patrimoine culturel africain (2018), livre une analyse sans concession de la crise en cours.

TV5MONDE : Vous êtes à Dakar depuis le début de la pandémie. Quelle est la situation sur place ?

Felwine Sarr : Dans l’ensemble, les gestes barrières sont respectés. Dans la rue, une large proportion de la population porte un masque. Dans les transports en commun, les pratiques évoluent aussi. Par contre, dans les lieux publics qui n’ont pas été fermés comme certains marchés, gargotes ou petits salons de thé, il y a une difficulté à respecter la distanciation sociale. Dans les supermarchés, malgré les marquages au sol, certaines personnes trouvent le moyen de ne pas s’y conformer. Il y a vraiment un travail à faire pour que les individus mettent de la distance entre les corps. Ce n’est pas facile, car la proximité est culturelle. 

L’Afrique reste le continent le moins touché en nombre de morts et de cas de Covid-19. Pourtant, les prédictions des instances internationales sont alarmistes…

Cela montre la persistance de l’afro-pessimisme. Nous sommes à un peu plus de 200 000 morts du coronavirus dans le monde. L’Afrique en déplore entre 935 selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et 1 598 selon le Centre pour la prévention et le contrôle des maladies de l’Union africaine (ce 30 avril, ndlr). Donc, nous sommes loin derrière.

Il est d’ailleurs intéressant de comparer le Sénégal aux États-Unis, deux pays ayant connu leur premier cas à peu près au même moment. La différence de propagation du virus et de réponse politique est frappante. Nous avons agi rapidement, quand les Américains ont tergiversé.